UN JOUR, UN ÉVÉNEMENT - 07 NOVEMBRE

07/11/2025

Un jour, un événement - 7/11 

Le 7 novembre 1836 : quand deux esclaves de La Réunion gagnent leur liberté

Le 7 novembre 1836, sur l'île Bourbon — aujourd'hui La Réunion — deux hommes esclaves, Guillaume et Augustin, voient leur vie bouleversée. En reconnaissance de leur rôle dans la dénonciation d'un complot d'esclaves à Saint-André, ils reçoivent leur affranchissement et une pension annuelle. Cet épisode, bien que peu connu, illustre la complexité et les contradictions du système esclavagiste à la veille de son abolition.

Une société sous surveillance

Dans les années 1830, l'île Bourbon compte encore près de 70 000 esclaves pour environ 100 000 habitants. Les maîtres vivent dans la crainte d'une révolte, hantés par le souvenir des soulèvements précédents — notamment celui de Saint-Leu en 1811.

Les autorités coloniales multiplient les mesures de contrôle : couvre-feux, milices, patrouilles, et surtout un système de surveillance reposant souvent sur les dénonciations internes.

Le complot de Saint-André

C'est dans ce climat de peur qu'éclate en 1836 une rumeur de conspiration à Saint-André, dans l'Est de l'île. Des esclaves auraient préparé un soulèvement contre leurs maîtres, projetant de s'emparer d'armes et d'incendier plusieurs habitations.

Deux esclaves, Guillaume et Augustin, préviennent leurs propriétaires ou les autorités locales. Leur dénonciation permet de déjouer la révolte avant qu'elle n'éclate, entraînant l'arrestation de plusieurs suspects.

La récompense du 7 novembre

En reconnaissance de leur « loyauté », le gouverneur de Bourbon signe, le 7 novembre 1836, un acte d'affranchissement pour Guillaume et Augustin.Non seulement ils obtiennent la liberté — privilège rarissime à cette époque — mais une pension annuelle leur est également attribuée, mesure exceptionnelle qui traduit la volonté du pouvoir colonial d'encourager la délation et de maintenir la peur du châtiment.

Une liberté ambiguë

Si l'événement peut sembler être une victoire personnelle pour Guillaume et Augustin, il révèle surtout la logique d'un système oppressif : récompenser la fidélité envers les maîtres plutôt que la quête de liberté. Leur affranchissement ne marque pas la fin de l'esclavage, mais une manœuvre politique destinée à prévenir toute résistance collective.

Mémoire et interprétation

Aujourd'hui, cet épisode est étudié par les historiens comme un symptôme de la fin d'un monde. Douze ans plus tard, en 1848, la France abolit définitivement l'esclavage dans ses colonies.Entre-temps, des gestes comme celui du 7 novembre 1836 rappellent combien la liberté, sous le joug colonial, pouvait être accordée comme une faveur plutôt que reconnue comme un droit. « En libérant Guillaume et Augustin, l'administration coloniale ne récompensait pas la justice, mais la soumission. »




Sources :

* Portail Esclavage Réunion – « La résistance des esclaves à l'île Bourbon »

* Archives départementales de La Réunion, Dossiers d'affranchissement, 1836