
DU BERCEAU PARISIEN AUX TERRES BOURBONNAISES : L’HISTOIRE DE CHARLES CLAUDE MOUCHET
Dans les annales familiales de ma lignée maternelle, se dessine le portrait de Charles Claude MOUCHET (Sosa 212), dont la vie débute le 21 octobre 1732, au cœur de Paris, en la paroisse Saint-Nicolas-des-Champs. Son berceau fut dressé rue Quincampoix (75), où ses parents avaient établi leur demeure. À l'aube de cette nouvelle vie, il eut pour parrain Charles SPIRE, orfèvre de son état et cousin de son père, et pour marraine Clémence MOUCHET, sa tante paternelle.
Charles Claude était le fruit de l'union de Denis Claude MOUCHET (Sosa 424) et de Marie Barbe ROBEQUIN (Sosa 425). Son père, Denis Charles, avait vu le jour à Paris le 6 janvier 1678, et fut baptisé le lendemain en la paroisse Saint-Gervais, fils de François MOUCHET (Sosa 848) et de Denise Marguerite THIBERT (Sosa 849). Le 16 septembre 1713, il unissait sa destinée à celle de Marie Barbe ROBEQUIN, sous l'égide d'un contrat de mariage rédigé par le notaire parisien Louis LARSONNIER. Denis Charles embrassa d'abord le métier d'aubergiste, avant de devenir compagnon orfèvre, ainsi que le révèle son acte de décès daté du 8 juin 1748. Il s'éteignit à l'âge de soixante-dix ans, et fut inhumé le lendemain, en présence de ses fils, Charles et Claude Charles MOUCHET, ainsi que de ses cousins, Charles Louis et Charles SPIRE.
Quant à sa mère, Marie Barbe, elle avait ouvert les yeux sur le monde le 12 mars 1689 à Charenton-le-Pont, et fut baptisée le jour suivant. Fille de Jean ROBEQUIN (Sosa 850) et de Catherine VASSEL (Sosa 851), elle eut pour parrain le sieur François LAURENT, jardinier de la mission, et pour marraine, la dame Barbe LUBERT, parente maternelle par alliance. Son existence prit fin avant celle de son époux, comme en témoigne l'inventaire après décès, dressé le 27 février 1740 à Paris, à la demande de son mari alors veuf.
Les racines de Marie Barbe méritent à leur tour d'être évoquées. Son père, Jean ROBEQUIN, était le fils de Yves ROBEQUIN (Sosa 1700) et de Marguerite VILLET. Il naquit à Charenton-le-Pont, où il fut baptisé le 17 janvier 1657, sous le parrainage du sieur Anthoine CAUDET et de la dame Françoise GRASSIN, épouse du sieur DOLART. Il épousa le 7 février 1679, à Charenton-le-Pont, Catherine VASSEL, fille de Jean VASSEL et d'Anne BOUCHER, en présence des sieurs Noel SANNEGON, beau-frère de l'époux, Anthoine CAUDET, Charles VASSEL, Jacques BOISDON et Jean LENORMAND. Peu de détails nous sont parvenus sur la vie de Catherine, sinon son ascendance. Quant à Yves ROBEQUIN, son père, il est mentionné comme originaire de la paroisse de Wissous (Val-de-Marne) et avait lui-même épousé Marguerite VILLET en 1642, à Charenton-le-Pont, avant de s'éteindre le 13 juillet 1663 dans cette même ville. Aucune information complémentaire n'est connue sur Marguerite VILLET.
C'est là que l'énigme s'épaissit, que les contours de la vie de Charles Claude MOUCHET se brouillent, pour laisser place à l'écho des possibles. Tandis que l'appel du large se faisait sentir, deux certitudes demeurent : Charles Claude, rompant avec la quiétude parisienne, embarqua en qualité de Caporal de la Compagnie de Laval, et son destin fut lié à l'Achille.
Au-delà de ces faits avérés, le récit sur son recrutement se tisse d'hypothèses. Il est plausible que son recrutement se soit fait à Paris, où la Marine royale disposait alors d'un bureau à l'Hôtel de la Marine, Place de la Concorde. Il aurait ainsi pu intégrer les rangs de ces compagnies coloniales que le roi envoyait défendre les lointaines possessions françaises. Ces troupes, détachées des compagnies franches de la Marine ou du régiment de Pondichéry, étaient destinées à renforcer les garnisons des Mascareignes et de l'Inde. Les convois de soldats quittaient presque chaque printemps les ports de l'Atlantique pour rallier Port-Louis, sur l'Île de France, d'où certains continuaient vers Bourbon. À l'issue de leur service, nombreux étaient ceux qui choisissaient de s'y établir durablement, recevant souvent une concession de terre en récompense de leur engagement.
Son navire, l'Achille, un imposant vaisseau de 1 200 tonneaux et 24 canons, fort de ses 258 membres d'équipage sous le commandement du capitaine Antoine LEVESQUE DE BEAUBRIAND, quitta le port de Lorient. Le voyage fut long et semé d'escales exotiques, menant l'Achille de Gorée au Cap de Bonne-Espérance, puis à Madagascar et aux Mascareignes. Il posa finalement le pied sur l'Île de France (île Maurice) le 1ᵉʳ mai 1753, avant de rejoindre plus tard, l'Île Bourbon, poursuivant ainsi son destin au-delà des mers.
Charles Claude MOUCHET fut marié une première fois le 5 septembre 1757 à Saint-Paul (974), à Marguerite DUMOULIN. Après son décès le 28 décembre 1758 à Saint-Paul, il unit sa destinée le 6 janvier 1760, à Saint-Pierre, à Louise Gabrielle LEFEVRE (Sosa 213). Née le 6 mars 1747 dans cette même ville, elle était la fille de Jean Baptiste LEFEVRE (Sosa 426), originaire de la Sarthe et établi dans la colonie depuis 1737, et d'Élisabeth LEMERCIER (Sosa 427), native de Saint-Paul. De leur union naquirent quatre enfants : Suzanne (1766–1829), Barbe (1768–1844), Jean Baptiste MOUCHET (Sosa 106) (1771–1802) — mon ancêtre direct — et Charles (1773), qui ne survécut que quelques semaines. Louise Gabrielle s'éteignit prématurément, le 4 novembre 1773, quelques jours après avoir donné naissance à ce dernier enfant, qui devait lui aussi mourir en bas âge, le 1ᵉʳ décembre suivant.
Charles Claude poursuivit seul la route encore quelques années, avant de s'éteindre à son tour le 7 mars 1777, à Saint-Pierre, à l'âge de 44 ans, laissant derrière lui trois orphelins de 11, 9 et 6 ans.
Quelques années plus tard, Jean Baptiste (Sosa 106), son fils, et avec l'accord de son tuteur épousa à 18 ans Marie Brigitte HOARAU (Sosa 107), le 3 novembre 1789, à Saint-Pierre. De ce couple naquit en 1800 Célerine MOUCHET (Sosa 53), mon aïeule. Jean Baptiste disparut prématurément à l'âge de 30 ans, le 17 mars 1802, alors que sa fille n'avait que deux ans. Veuve jeune, Marie Brigitte lui survécut encore de longues années, jusqu'à son décès en 1842 à l'âge de 73 ans.
Célerine, quant à elle, se maria par deux fois : d'abord avec Louis Marie MUSSARD (Sosa 52), avec qui elle eut plusieurs enfants, dont Pierre Louis MUSSARD (Sosa 26), puis, après le décès de son premier époux, avec Louis LEBON. Elle s'éteignit à l'âge de 81 ans, au terme d'une longue vie marquée par la résilience et la transmission.
On relèvera enfin qu'un point d'ombre entoure son acte de mariage avec Louis Marie MUSSARD : le registre mentionne son épouse sous le nom de Catherine Delphine, née le 30 juillet 1791. Or, les archives révèlent que Catherine Delphine était en réalité la sœur aînée de Célerine, décédée dès l'âge de 7 ans, le 15 mars 1804 (24 Ventôse an XII), comme en témoigne son acte de décès conservé aux ANOM (page 9). Cette confusion administrative illustre les approximations fréquentes des registres de l'époque et ajoute à la singularité de l'histoire familiale.






