
L'ORDONNANCE DU 30/12/ 1827
Le Saviez-vous ?
L'ordonnance du 30 décembre 1827 et la répression des mineurs à l'île Bourbon
Un contexte colonial et pénal
Au début du XIXᵉ siècle, l'île Bourbon (aujourd'hui La Réunion) est une colonie française où les textes métropolitains ne s'appliquent pas automatiquement. Le gouvernement royal cherche alors à uniformiser le droit pénal dans les colonies.
C'est dans ce contexte qu'est promulguée l'ordonnance du 30 décembre 1827, « portant application du Code pénal à l'île Bourbon ». Elle adapte le Code pénal de 1810 aux réalités locales et fixe les modalités de poursuite, de jugement et d'exécution des peines sur l'île.
Les mineurs de moins de seize ans
Parmi les dispositions de cette ordonnance, les articles 67 et 69 traitent spécifiquement de la responsabilité pénale des mineurs.
Conformément à la logique du Code pénal de 1810, ils posent que les jeunes de moins de seize ans condamnés pour un crime ou un délit doivent être enfermés dans une maison de correction. Cette mesure vise à la fois à punir et à « corriger » les jeunes délinquants, selon la philosophie pénale de l'époque qui mêle répression et éducation morale.
Selon la citation tirée d'un article du site Criminocorpus :« Conformément aux articles 67 et 69 de l'ordonnance du 30 décembre 1827 portant application du Code pénal à l'île Bourbon, les mineurs de moins de seize ans condamnés pour un crime ou un délit doivent être enfermés dans une maison de correction. »
Cette disposition marque la transposition coloniale du droit pénal métropolitain : les enfants jugés coupables ne sont pas exécutés ni incarcérés avec les adultes, mais placés dans des établissements séparés censés assurer leur rééducation.
La mise en œuvre : les maisons de correction
En pratique, cette mesure conduira à la création de structures spécifiques pour les jeunes détenus, mais souvent dans des conditions extrêmement dures.Le cas le plus connu est celui du pénitencier de l'Ilet à Guillaume, ouvert en 1864 sur les hauteurs de Saint-Denis. L'établissement accueillait des enfants condamnés pour vol, vagabondage ou autres délits mineurs, dans un régime disciplinaire sévère.Les archives et témoignages décrivent un système punitif proche du bagne, bien éloigné des idéaux de « correction » et d'éducation morale que la loi proclamait.
Une mesure révélatrice du système colonial
L'ordonnance de 1827 illustre la transposition sélective du droit métropolitain dans les colonies. Si les principes du Code pénal sont repris, leur application s'inscrit dans un cadre colonial où les logiques de discipline, de contrôle social et d'ordre public priment sur celles de protection de l'enfance.Elle témoigne aussi de la naissance d'une politique pénale spécifique envers les mineurs, qui annonce les futures lois sur l'enfance délinquante en métropole à la fin du XIXᵉ siècle.
Sources pour aller plus loin :
* Ordonnance du 30 décembre 1827 portant application du Code pénal à l'île Bourbon, Imprimerie royale, Paris, 1828.* Bruno Maillard, « "Ils sortiront des hommes". Les enfants du pénitencier de l'Ilet à Guillaume (île de La Réunion, 1864-1879) », Criminocorpus, 2012 :
* Code pénal de 1810, art. 66 : sur la responsabilité des mineurs et la détention en maison de correction.* Delabarre de Nanteuil, Législation de l'île de La Réunion, 2ᵉ éd., Saint-Denis, 1861.
* Ministère de la Justice, Les Cahiers d'études pénitentiaires et criminologiques, n° 52, juin 2020 : La justice des mineurs au XIXᵉ siècle.

