
LA MÉMOIRE DES DEPARIS : QUAND LES ARCHIVES REDONNENT VIE AUX ANCÊTRES
C'est en suivant les traces de mes ancêtres que je me suis retrouvée plongée dans l'histoire fascinante de mon aïeul Jacques LAURET (Sosa 1120) né à Saint-Franchy dans la Nièvre, département où sa lignée maternelle est originaire. Au fil de mes recherches généalogiques, j'ai eu la chance de tomber sur un article ancien conservé dans les archives numériques de Gallica. Ce texte évoquait la famille de Gabrielle DEPARIS ou DE PARIS (Sosa 2241), la mère de Jacques, et révélait des détails captivants sur les origines et l'ascendance maternelle de Jacques LAURET — ou LORET, selon les actes. Cette découverte fortuite a ouvert une petite fenêtre sur le passé et éveillé en moi une curiosité insatiable pour ce pan de mon histoire familiale.
Intriguée par ces premières révélations, j'ai décidé d'approfondir mes recherches. Je me suis alors immergée dans la lecture de l'ouvrage mentionné, l'Histoire de Jean-Baptiste DELAVEYNE, rédigé par l'abbé MARILLIER. Page après page, j'ai épluché ce texte avec minutie, cherchant chaque détail susceptible d'éclairer l'histoire de mes ancêtres. Cette lecture attentive, presque méditative, a enrichi ma quête et m'a permis d'entrevoir toute la richesse des vies qui se cachaient derrière ces simples noms.
Une famille enracinée dans la Nièvre
J'ai ainsi appris que la famille DEPARIS ou DE PARIS était établie depuis longtemps dans la Nièvre, à Saint-Saulge. Les parents de Gabrielle DEPARIS (Sosa 2241) étaient Claude DEPARIS (Sosa 4482), chirurgien et poète, et Antoinette CAMUS (Sosa 4483), accoucheuse de profession. Claude était le fils de Jean DEPARIS (Sosa 8964) le jeune et de Perrette D'HERE (8965). Il avait un frère, Simon, qui avait quitté le pays, et deux sœurs qui avaient épousé les deux fils DELAVENNE ou DE LAVENNE OU DELAVEYNE et nous reviendrons un peu plus loin sur le parcours du fils de Jeanne.
Les oncles paternels de Claude formaient un trio remarquable : Jean DEPARIS l'aîné, établi à Prémery ; Pierre DEPARIS, contrôleur au grenier à sel de Saint-Saulge ; et Claude DEPARIS, curé d'Oulon, réputé pour être un prêtre d'une grande vertu.
Claude DEPARIS et son épouse Antoinette CAMUS
Claude DEPARIS (Sosa 4482) épousa Antoinette CAMUS, séduit par sa beauté, son intelligence et sa sage conduite. Antoinette était la fille de Léonarde GERMAIN, surnommée « la mère Linon », une accoucheuse renommée. Suivant les traces de sa mère, Antoinette exerça le même métier avec un tel talent qu'elle était sollicitée par les grandes dames dans un rayon de plus de trente lieues.
De leur union naquirent six enfants, chacun avec son destin particulier.
Une tragédie familiale
Pierre, leur fils aîné et pharmacien de profession, connut un sort tragique. Il fut tué par son cousin Léonard DELAVENNE, fils de Jeanne DEPARIS, sœur de Claude. Les témoignages divergent sur les raisons de leur querelle : certains évoquent une dispute doctrinale passionnée, d'autres un conflit né après que le valet de Léonard eut endommagé un jardin appartenant au père de Pierre.
Un soir, alors que Pierre passait devant la grande porte de l'église de Saint-Saulge, il fut attaqué par Léonard et son valet. À deux contre un, le combat tourna mal. Pierre, mortellement blessé, rendit son dernier souffle sur le seuil de la maison familiale, située au milieu de la grande rue, là où résidait encore, des années plus tard, la veuve Lazare DEPARIS.
Cette mort brutale bouleversa profondément Claude et Antoinette. Claude, poète dans l'âme, composa des vers et une petite histoire relatant cette tragédie. Mais son texte, écrit dans la douleur, débordait de ressentiment. On choisit donc de le supprimer pour ne pas raviver les tensions entre des familles qui avaient depuis retrouvé la paix.
Claude souhaitait que son fils soit inhumé sous une pierre tombale mentionnant sa mort violente. Mais cette sépulture fut vandalisée par des partisans de Léonard DELAVENNE, et il n'en resta que des fragments. Léonard dut se cacher quelque temps, craignant les représailles. Finalement, on parvint à apaiser Claude en lui rappelant que le coupable était un proche parent et un jeune homme de mérite. Léonard DELAVENNE devint plus tard juge à Saint-Saulge et fut l'ancêtre de la lignée noble des DELAVENNE. Cette famille DELAVENNE donna d'ailleurs naissance à des personnalités remarquables, notamment Paul DE LAVENNE ou DELAVENNE, né à Nevers le 31 janvier 1794 et mort le 4 avril 1864, paysagiste français du XIXe siècle ayant dessiné plus de 300 parcs en France et en Europe. Il fut fait comte de Choulot en 1824.. Il s'agit d'un collatéral lointain de ma famille, son ascendante Jeanne DEPARIS étant la sœur de mon ancêtre Claude DEPARIS.
Les autres enfants et leurs destins
Après Pierre vint Jacques, apothicaire, qui épousa Edmée TALLARD. Le couple eut deux fils et trois filles, mais seule la descendance de leur fils cadet, Lazare, se perpétua.
Le troisième enfant était Jean, maître chirurgien, voyageur érudit et polyglotte qui parcourut l'Europe et même l'Inde. Il épousa Edmée DELARESSE et eut avec elle trois fils et deux filles. L'un de ses fils, Jérôme, devenu curé, laissa des chroniques manuscrites précieuses sur Saint-Saulge et ses habitants.
Léonarde, la quatrième enfant, épousa un certain LEGOING. Des siècles plus tard, un de ses descendants, Albert SOLEILLAND, commit en 1907 un crime qui fit scandale : il assassina à Paris une fillette de douze ans et fut envoyé au bagne de Cayenne. Ce sombre épisode a été relaté dans un précédent article fin juillet 2025.
Gabrielle (Sosa 2241), mon aïeule, était la cinquième enfant, suivie de Jeanne, la cadette, qui devint religieuse à la Visitation.
Une mémoire qui perdure
En refermant ce chapitre consacré à Claude DEPARIS (Sosa 4482) et à son épouse Antoinette CAMUS (Sosa 4483), un détail demeure troublant : aucune trace de leur décès n'a été retrouvée dans cet ouvrage. Pourtant, leur mémoire perdure à travers leur nombreuse descendance, notamment par leur petit-fils Jacques LAURET, fondateur de la lignée des LAURET à l'île Bourbon, auquel je consacrerai un article ultérieurement pour retracer son destin singulier.
C'est ainsi que se termine l'histoire de la famille DEPARIS dans mon arbre généalogique. Ces récits, découverts au fil des pages et des archives, m'ont profondément émue et fascinée. Derrière la froideur des actes d'état civil se révèlent des destins vibrants, marqués par l'amour, la tragédie et la rédemption. À mesure que j'avance dans ma quête, c'est tout un pan de mémoire familiale qui reprend vie sous mes yeux. Et même si le nom des DEPARIS ou DE PARIS s'est effacé de ma branche maternelle et paternelle, leur souvenir continue de vivre à travers ces histoires et ces vies qu'ils ont façonnées, gravé à jamais dans la mémoire de leurs descendants.


